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Salafisme ou soufisme : Diomaye et Sonko mettent fin à la polémique !

Salafisme ou soufisme : Diomaye et Sonko mettent fin à la polémique !

Salafisme ou soufisme : Diomaye et Sonko mettent fin à la polémique !
Dès son élection, le 24 mars, le nouveau président de la République, Bassirou Diomaye Faye, s’était attiré les critiques de certains chefs religieux soufis. « L’arrivée des Salafistes au pouvoir… », avait ainsi dénoncé sur Facebook Serigne Modou Bousso Dieng, qui tançait par la suite : « Bassirou Diomaye Faye parle et ignore les religieux dans son discours. Je vous l’avais dit », faisant allusion à la première sortie du candidat de « DiomayePrésident » à qui les lourdes tendances donnaient vainqueur du scrutin.
 
Mais le coordonnateur de la Confédération internationale des familles religieuses (Cifa) s’est vite montré moins catégorique. Il a même sauté de joie, en regardant les images devenues virales de la visite du chef de l’État dans sa ville, Touba, et à Tivaouane. « Je suis un opposant sûr qui y reste. Mais diomay nékhnama (sic) », a-t-il encore commenté, lundi soir, le geste du chef de l’État. M. Dieng, connu pour ses positions tranchées surtout dans les questions liées aux familles religieuses, et qui s’est montré très critique à l’égard des nouvelles autorités et de leur « projet », semble donc tourner la page.
 
 
Un mois plus tôt, d’autres voix, et pas n’importe lesquelles, se sont élevées, lors de la période préélectorale, pour dénoncer un apparent manque de considération du candidat désigné par Ousmane Sonko pour les guides religieux. « Il n’a même pas daigné aller saluer les chefs religieux pendant la campagne électorale », s’indignait ainsi Abdou Lahad Seck, ancien député de l’Apr, devenu haut conseiller des collectivités territoriales (Hcct). Il reprochait notamment au président élu d’avoir fait exprès d’aller de nuit à Touba (capitale du Mouridisme) lors de la campagne électorale, sachant qu’il lui serait impossible de voir à cette heure « tardive » le khalife, Serigne Mountakha Mbacké.
 
Cette imputation n’est pas nouvelle, puisque déjà en novembre dernier, un député avait accusé de faits analogues celui qui doit prendre la tête de l’État sénégalais le 2 avril. « Les Sénégalais connaissent la vérité, Bassirou n’est jamais allé à Touba, encore moins à Tivaouane, ni dans un autre foyer religieux », avait chargé Cheikh Seck avant d’insister : « Cet homme ne donne pas la main aux religieux parce qu’il ne les respecte pas ».
 
Beaucoup de ceux qui ont porté ces accusations, ces derniers jours, disent être inspirés par le « discours violent » et les sorties pas « rassurantes » de responsables de Pastef. L’on cite d’ailleurs celle faite, le 13 février 2023, par Ngagne Demba Touré, coordinateur des jeunes dudit parti : « Notre projet, c’est de mettre fin à la vénération de l’homme pour la vénération exclusive de Dieu et point final ». Ce qui avait suscité une vive polémique parmi certains disciples des confréries religieuses.
 
 
 
« Démocrates, salafistes convaincus et indépendantistes »
 
 
 
Issu d’un milieu modeste et loin des élites de Dakar, le discret ancien inspecteur des impôts est sorti de l’ombre de son ami et leader d’opposition Ousmane Sonko en devenant, à 44 ans, le plus jeune président de l’histoire du pays. Et s’il est « plébiscité » au premier tour (plus de 54%), c’est parce que lui et son camp ont prôné, dans leur projet politique, la rupture dans la gestion des affaires étatiques. Une posture anti-systémique qui, apparemment, a coûté cher aux têtes de proue de Pastef, tous pratiquement des fonctionnaires de l’État.
 
 
 
« Au sein de Pastef, il y a des démocrates purs et durs, convaincus, mais il y a aussi des salafistes purs et durs, convaincus, tout comme il y a des indépendantistes. À ce titre, il soutient que « si on choisit Diomaye Faye, c’est pour privilégier l’un des courants », a avancé Madiambal Diagne, fin décembre dernier, dans l’émission « Tollouway » sur Seneweb. Une déclaration qui vient corroborer celle faite, le 2 octobre 2023, dans une chronique du lundi: « Le parti Pastef reste constitué par un conglomérat d’obédiences, de courants ou d’intérêts les plus opposés ou les plus antagoniques possibles ; leur seul liant aura été que la personne de Ousmane Sonko pouvait être le bélier qui leur forcerait les portes du pouvoir. Ainsi y retrouve-t-on, côte à côte, des indépendantistes du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), des salafistes et autres islamistes assumés qui préconisent l’avènement d’un État théocratique au Sénégal, même au prix de la violence armée, des démocrates avérés, fourvoyés ou abusés, des révolutionnaires à la petite semaine, nourris et entretenus par des intérêts étrangers qui travaillent ouvertement à supplanter les alliés traditionnels du Sénégal que sont la France, l’Union européenne, les États-Unis d’Amérique et les pays musulmans dont la pratique religieuse est proche de celle de la majorité des Sénégalais et, enfin, une bande d’affairistes à tout crin, si pressés de dépecer la bête Sénégal et la dévorer à belles dents ».
 
Des clichés, avec en médaillon les bras croisés du chef de l’État, lors de la prière, ont été largement partagés le jour de la korité, pour affirmer qu’il serait d’obédience salafiste. Mais, cela n’a pas pu prospérer. Car, dans les minutes qui ont suivi, d’autres images ont démontré que des érudits comme Cheikh al Islam Ibrahima Niasse et Mame Abdoul Aziz Sy Dabakh avaient l’habitude d’accomplir l’acte spirituel de la sorte. 
 
La dernière sortie du président élu, Bassirou Diomaye Faye, est donc perçue par des observateurs comme une opération de charme. Car il a voulu, à travers ses faits et gestes devant les khalifes (Serigne Mountakha Mbacké et Serigne Babacar Sy Mansour), montrer aux Sénégalais qui l’ont élu que lui, son mentor, Ousmane Sonko, et toute la galaxie Pastef sont de fervents talibés.
 
 
 
« Candidat de Daesh », dixit Ahmed Khalifa Niass
 
 
 
L’objectif étant alors d’effacer toutes les accusations qui ne datent pas d’aujourd’hui, dans un Sénégal où le spirituel et le temporel se côtoient harmonieusement pour la plupart. En effet, depuis le lancement de son livre-vision, « Solutions pour un Sénégal nouveau », le16 septembre 2018, à la place de l’Obélisque, le leader du Pastef fait l’objet d’une levée de boucliers et d’une série de tirs groupés venant de toutes parts. C’est Ahmed Khalifa Niasse, qui a déclenché les hostilités, dès le 1er octobre 2018, en déclarant, dans une contribution, qu’Ousmane Sonko serait le candidat de Daesh. « Il y a lieu de savoir que l’idéologie de Sonko est la même qui a sévi à Grand-Bassam, dans la zone de Mopti et au nord du Mali. Elle a ouvert un front au Burkina Faso, ancienne Haute-Volta », disait-il. Et d’ajouter : « Je le défie de déclarer, la main sur le Coran, que tuer un Mouride ou un Tidiane n’est pas un acte sacré selon l’enseignement salafiste ».
 
Début février 2019, Dame Babou, journaliste sénégalais basé aux États-Unis, taxait Ousmane Sonko, alors candidat à la présidentielle prévue pour ce même mois, de « dangereux Salafiste [qui] veut interdire aux femmes le travail rémunéré. Il veut les confiner aux tâches domestiques avec le voile entièrement enroulé autour du corps. D’où sa proposition de congés de maternité de six mois. C’est la meilleure manière de décourager les entreprises d’embaucher les femmes ».
 
 
 
«Stigmatisation »
 
 
 
Quelques jours plus tard, alors que ses propos ont fini de susciter un tollé, il revient à la charge, soutenant être « conforté » dans son analyse comme quoi « nous sommes en face d’un dangereux mouvement d’inspiration salafiste ». Et pour appuyer son argumentaire, M. Babou a souligné que « la première marque de fabrique des mouvements de ce type est l’embrigadement de forces vives qui ont la naïveté de croire qu’elles sont au service d’une cause moralement supérieure à toutes les autres ».
 
Des accusations graves auxquelles, Sonko, qui fait acte d’allégeance à la confrérie mouride, a répondu avec colère en dénonçant une stigmatisation. « Je suis le seul homme politique sénégalais à qui on pose des questions sur sa foi, si je fais partie du mouvement Ibadou Rahmane – un courant musulman rigoriste- parce que j’ai la barbe et que mes deux femmes sont voilées. Cette question induit à une stigmatisation d’une catégorie de sénégalais », s’était-il indigné, face à la presse.
 
Mais il ne s’est pas arrêté là. Sonko a fait le tour des foyers religieux à divers événements comme pour se débarrasser de cette étiquette. L’ancien inspecteur des impôts s’est alors vite adapté aux spécificités de la famille religieuse où il se rend, aussi bien par le discours que dans le comportement.
 
À Touba, il se met carrément par terre tel un fidèle talibé venant prendre le ‘’Ndigel’’ (recommandation) de son khalife. Dans la capitale du mouridisme, il a aussi émis son souhait de participer à la construction de la future université islamique, l’université Cheikh Ahmadou Bamba (fondateur du mouridisme).
 
En campagne à Tivaouane, à la veille de la présidentielle de 2019, il adopte la même stratégie communicationnelle. « Nous sollicitons des prières pour nous et pour le pays, le Sénégal. Mais, si c’est bon pour moi et mauvais pour le pays, que mes prières ne soient pas acceptées. Si ce n’est pas meilleur pour moi et que c’est mieux pour le pays, qu’elles soient exaucées. Maintenant, si c’est bon pour nous tous, c’est encore mieux », a-t-il notamment sollicité auprès de Serigne Babacar Sy Mansour.
 
À Médina Baye, à la même période, le député d’alors se présente vêtu d’un grand boubou bleu, arborant le traditionnel bonnet que portent les talibés de Cheikh Ibrahima Niasse, du Sénégal au Nigéria. « Quand un blanc disait que : les pays qui ont le plus de musulmans vont en premiers revendiquer et réclamer l’indépendance, car l’islam est en relation avec le communisme, avec l’esclavage, Cheikh Brahim Niasse a pris sa plume en répondant que :  ‘’L’Afrique doit revenir aux Africains’’ », a-t-il témoigné à l’endroit de Cheikh Al Islam. Une réponse qui, révèle Ousmane Sonko, était véhiculée dans un contexte où certains de nos dirigeants négociaient l’indépendance.
 
Ce n’est pas tout. Profitant de la célébration de la Toussaint par la communauté chrétienne, le 1er novembre 2019, il se fait recevoir par Mgr Benjamin Ndiaye et profite de cette tribune pour s’adresser directement à cette communauté.
 
Aujourd’hui, beaucoup de détracteurs, dont Ahmed Khalifa Niass, ont commencé à s’effrayer un chemin pour se rapprocher des nouveaux tenants du pouvoir. Ce qui peut pousser à croire que ces accusations ont plus de valeur politique que confessionnelle. 

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